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 Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones]

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MessageSujet: Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones]   Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones] Icon_minitimeDim 9 Déc - 11:37

A chacun de mes pas sur le gravier crissant sous mes chaussures je n'avais de cesse de me dire * Non, n'y va pas, repars, rentre chez toi… *, la voix lancinante tournait continuellement dans ma tête, ces forces en moi s'heurtant, m'obligeant à avancer et à reculer en même temps, me faisant fuir, tout en me garder enracinée au sol. Plusieurs fois j'avais failli faire demi-tour, repartir en courant jusqu'à la ligne de métro et rejoindre mon studio miteux de Brexton où il n'y avait encore que les cafards qui y trouvaient leur compte. Encore une fois je levai mes yeux dont la couleur sous le soleil voilé de l'après-midi nuageuse oscillait entre le brun chocolat et le vert olive, pour observer la grande bâtisse se profilant sur le ciel, un manoir imposant trônait devant moi, comme un golem de pierres gigantesque, et je me sentais minuscule dans son ombre sans fin. Enfin, pour moi en tout cas c'était imposant, je n'avais jamais vécu dans le luxe, et jamais vraiment dans le confort, de l'orphelinat à Brixton en passant par Liverpool… C'était pour ces choses là que j'étais venue jusqu'ici, pour le mal qu'on m'avait fait, pour ce que Derek m'avait fait, en tout cas, pour le reste, pour ce qu'il s'était passé à Liverpool, ça je n'en dirais rien.

C'était arrivé dans la nuit de samedi à dimanche, le cabaret était plein toute la nuit les week-end, et nous avions fini très tard, j'avais été l'une des dernières à partir, c'était à moi d'aider à la fermeture. Je n'avais pas eu le temps de faire seulement quelques pas dans la rue que Derek était arrivé dans mon dos, m'attrapant au bras et m'entrainant dans une ruelle sombre, une main sur ma bouche pour m'empêcher de crier. Encore une fois, il avait pu me posséder, me battre, jusqu'à que je finisse inconsciente sur le pavé, ses insultes me marquaient autant que ses coups. Et à mon réveil, j'étais de retour dans ce bon vieux hôpital Saint-James, le corps douloureux d'avoir encore été criblé de ses poings enragés, honteuse de ce qui venait de se produire, une nouvelle fois, malgré toute ma volonté pour m'en sortir, que mon corps reste mien, que plus personne ne puisse y toucher comme ça… Toujours la même question du médecin qui commence à avoir l'habitude de me voir débarquer dans cet état pitoyable aux urgences :

" Mademoiselle Wood, vous ne voulez vraiment pas qu'on prévienne la police ? "

Un non de la tête, non, ma force et mon courage ne vont pas si loin. J'avais trop peur de lui pour oser aller à la police, j'avais déjà du leur en parler une fois, et ça n'avait fait qu'accroitre sa fureur, il ne devrait même pas avoir le droit de s'approcher de moi, il ne s'en prive pas pourtant. L'interdiction judiciaire ne l'empêche pas de me suivre jusqu'à chez moi pour m'agresser dans mon propre appartement, ou juste dans la cage d'escalier quand il a trop envie pour attendre que j'arrive jusqu'à la porte… Mais cette fois, le médecin avait agi différemment de d'habitude, il avait semblé hésitant un instant, se demandant si ce qu'il allait me dire était susceptible de me faire du mal, puis il m'avait parlé d'une chose qui pouvait m'aider, et d'une femme qu'il me conseillait d'aller voir. Neela M. Jones… Il m'avait donné sa carte, elle était entrain de monter une association pour venir en aides aux femmes battus. C'était étrange, j'avais accepté très facilement d'aller aux drogués anonyme, mais l'idée d'aller livrer à une inconnue les sévices que Derek me faisait subir m'était très difficile. Je m'étais mordu les lèvres, jaugeant du pour et du contre, avant d'accepter la carte…

Cela dit, le pour et le contre je le dose toujours. J'y ai réfléchis des heures durant, assisse dans mon studio contre le mur, à regarder le petit bout de papier que je faisais danser entre mes doigts. Non, je pouvais pas faire ça, je pouvais pas parler de ces choses, il m'avait menacé, je n'avais pas le droit. Oui, mais je souffrais, et je voulais qu'il arrête de me faire du mal, ce qu'il m'avait fait, comme ce que j'avais pu vivre à Liverpool, ou même subir de la part d'autres hommes à Londres, m'avait marqué encore plus profondément que les coups et les viols m'avaient marqués physiquement. C'était une blessure très profonde, dans mon âme, mon cœur, mon esprit. Ces plaies faisaient mal, j'avais beau garder ce sourire épanouie sur mes lèvres rouges, j'avais mal à l'intérieur, même si je ne voulais pas le savoir. J'avais finalement oser l'impensable, et pris mon téléphone pour appeler cette femme, Neela, qui m'avait donné rendez-vous chez elle, maintenant, dans… moins d'une minute. Moins d'une minute pour atteindre la porte et oser frapper, moins d'une minutes pour régler le conflit intérieur qui m'empêchait d'avancer plus.

Je déglutis, le regard toujours fixé sur le grand manoir, je fermai les yeux un instant, * tu peux le faire *, tu as fais pire que ça… Oui, bien pire. Je rouvris les yeux avant que les images ne m'assaillent, les souvenirs, le passé appartenait au passé. Tout comme les cicatrices qu'il m'avait laissé appartiendraient toujours à mon corps. A cette pensée j'avais posé ma main sur mon avant bras, j'étais nerveuse, me balançant d'un pied à l'autre, à quelques mètres seulement de la grande porte en bois, à quelques mètres qu'il me fallait avoir le courage de traverser… * Tu peux le faire, t'a fais pire que ça… * oui je sais. J'avais tout autant peur du temps où je venais dans ces manoirs pour satisfaire l'appétit de grands riches qui m'usaient toute une nuit entière, payant le prix fort pour avoir une gamine rien que pour eux pendant toutes ces heures d'agonie et d'humiliation. Je secouai la tête, mon corps repris vie, ma main agita mes cheveux, les repoussant en arrière, le tintement doux de mes bracelets de cuivre aux poignets se mêla aux chants des oiseaux dans les arbres s'élevant de part en part comme des épées pointant vers le ciel, prêt à crever les nuages pour se repaitre de son festin.

J'avais peur, c'est vrai, mais j'avais vu pire, je n'avais pas grand-chose à craindre d'aller parler à cette femme, si ce n'est quelques larmes peut-être, rien de bien méchant. Alors qu'est-ce qui me terrifiait à ce point ? Je pris une inspiration mesurée et décidée, et me dirigeai à grands pas vers la porte d'entrée, traversant l'allée bordée de parterres de fleurs. Des parterres de fleurs… Chez moi c'était plutôt des parterres de béton qui venaient égayer… Le béton. Je gravis les quelques marches du perron, et m'arrêta juste devant la porte, paralysée d'un seul coup. Je soufflai, expirant lentement. D'un coup d'œil je vérifiais Ma tenue et la remis bien en place, veillant à ne pas avoir l'air trop… misérable, dans le pantalon le moins troués que j'avais, avec mon pull beige délavé et mon manteau qui n'a plus de manteau que le nom. Je jetai un nouveau regard au manoir. Je n'étais pas vraiment en harmonie avec le décor.

Finalement je finis par décider de lever la main, et toquai à la porte quelques coups, attendant en suite une minute pour oser utiliser la sonnette. J'entendis le clic du déverrouillage et la poignet tourna. Un homme m'apparu dans l'embrasure de la porte, qui était-il ? Je lui offris mon sourire normal, avant de me mettre à lui parler d'une voix douce et timide :

- Bonjour, excusez-moi, je suis Amelia Wood, je suis désolée de vous déranger, j'avais rendez-vous avec mademoiselle Jones, mais si elle n'est pas là je peux repasser…


Dernière édition par Amelia Wood le Dim 9 Déc - 22:08, édité 1 fois
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Gabriel M. Llewelyn

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MessageSujet: Re: Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones]   Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones] Icon_minitimeDim 9 Déc - 14:50




I can help you if you want






Je fixais sa machine à écrire en caressant mon ventre, je n'avais quasiment pas réussi à dormir de la nuit. Depuis ma rencontre avec Jamie en même temps, je n'étais plus moi-même. C'était comme si la dépression et la douleur que j'avais réussi à estomper étaient revenues intactes et deux fois plus violentes en moi. Pourquoi est-ce que le destin me faisait-il vivre un enfer pareil ? Je n'arrivais pas y croire. Je ne comprenais pas surtout... Je n'arrivais même plus retenir mes larmes tant j'étais chamboulée par tout ça. C'était horrible, vraiment. Je ne comprenais pas pourquoi... Parfois je me disais que c'était Takumi qui avait voulu ça, après je me disais que j'étais terriblement stupide d'oser croire ça. J'essayais de rester le plus calme possible pour Meili. J'avais eu tellement peur d'accoucher sur place le jour là en le voyant face à moi. Il avait tout... tout comme lui. On disait souvent qu'on avait notre sosie quelque part sur terre. Mais comment croire que celui de mon amoureux défunt allait être mon futur gynécologue ? Far away passait en boucle depuis une heure alors que Liza se décida à toquer à la porte du bureau avant de l'ouvrir. "Mademoiselle, un appel pour vous." Je la regardais, vide de toute émotion avant de me lever pour prendre le téléphone. Ce fut bref. Une jeune femme avait eut vent de l'association Taken, et avait besoin de discuter avec moi. Je n'avais rien d'officiel encore, mais je voulais essayer de l'aider. Ca ne pouvait que me faire du bien. Oublier mes soucis pour m'intéresser à quelqu'un d'autre. "Vous êtes sûre ?" Je regardais Liza en hochant la tête. "Je vais aller réveiller Thisbe, elle doit aller travailler." "Elle est déjà partie." "Déjà ?" Je la fixais interloquée. Comment avait-elle pu s'en aller si tôt sans que je ne vois rien ? "Elle est partie il y'a une heure, elle est venue vous dire au revoir..." Mon regard se posa dans le vide l'espace de quelque seconde avant qu'un faux sourire n'étire mes lèvres. "C'est vrai, j'ai totalement oublié." "Venez manger Mademoiselle." "Vous avez manger Liza ?" "Non, jamais avant vous." "Mangez avec moi s'il vous plait... Le temps que Jean ne rentre du garage..." Elle était surprise par ma demande, on avait pas du lui apprendre à vivre ainsi dans son école de gouvernante. Mais je refusais d'être une patronne avec eux. Il avait vécu dans se manoir plus longtemps que moi, et sans eux, je ne serais pas grand chose. "D'accord Mademoiselle, si ça peut vous redonner le sourire." J'étais tellement désemparée depuis la rencontre avec Jamie Poesy... "Et puis, il faut nourrir votre petite princesse." Elle avait raison, je devais au moins me ressaisir pour Meili, et pour l'association, et pour cette jeune femme qui arriverait d'ici peu. On s'en alla à la cuisine, je n'avais aucune envie de dîner dans la grande salle à manger. "Je prendrais tout mes repas ici maintenant. Je n'ai pas envie de retourner dans la salle à manger, c'est trop déprimant quand on est seule." "Bien." Elle nous servit une blanquette de dinde avec de la purée maison, et des petits fagots d'haricots. J'adorais sa façon de cuisiner, mais je me sentais tellement assistée par moment à ne plus rien faire par moi-même. Seulement, je n'osais le dire à personne. Je ne voulais pas avoir le droit au regard plein de rancoeur disant : pauvre petite fille riche qui se plaint. "C'est délicieux Liza." "Merci Mademoiselle." Et le reste du repas se déroula silencieusement.



A la fin, je pris le temps d'aller refermer le bureau de Takumi en prenant soin de tout éteindre et de vérifier que chaque chose était à sa place. Jean rentra avec ma nouvelle voiture et en profita pour r'allumer toutes les cheminées du manoir afin qu'on se sente mieux. Les pièces étaient tellement grandes à chauffer que parfois c'était une véritable horreur, et si on ne voulait pas dépenser trop en chauffage, on se contenter de pull et du feu de bois. Je pris un livre et m'installa dans un des fauteuils prêt de la cheminée, caressant mon ventre rebondit pour calmer ma fille et la faire dormir. "Mademoiselle ?" Je regardais Jean avait un petit sourire, il avait une cinquantaine bien tassé mais il était remarquablement bien conservé, et puis il avait en lui cette douceur que j'aimais terriblement. "J'ai eu des nouvelles pour le près." "Oh, alors ?" "Ils veulent bien nous le vendre, et je suis entré en contact avec un maçon, il peut faire l'écurie après le mois de Janvier, il voulait voir avec vous pour les plans et la taille qu'elle prendra." "On en fera pas une immense... 4 ou 5 box seront suffisants. J'aimerais prendre d'autres chevaux, des vieux, des jeunes, peu importe." Il me regarda longuement avant de se mettre assis à mes côtés en me prenant la main. Il n'avait jamais été si proche de moi jusqu'à maintenant. "Ce n'est pas... en sauvant la terre entière que vous vous sauverez vous... ou que votre culpabilité disparaîtra. Il n'est pas mort à cause de vous. Ce n'est pas votre faute Mademoiselle." "Oui....je... je sais..." J'étais sur le point de pleurer tellement il m'avait ému. "Non..." Il me fixa intensément. "Ce n'est pas de votre faute." J'hochais la tête négativement en essayant de retenir mes sanglots. "Ce n'est pas... de votre faute !" Ce fut... la phrase de trop. Tout se déversa dans un torrent d'émotion alors qu'il me prit contre lui. Il avait comprit ce dont j'avais besoin, ce que mon père aurait du me donner depuis longtemps au lieu de me traiter comme une paria. Jean fit quelque chose qui me fit extrêmement de bien. Et après avoir pleuré cinq bonnes minutes dans ses bras, j'eus un sourire sincère et brisé à la fois en le regardant. "Merci..." "Battez vous pour vous déjà, pour votre bébé, et ensuite pour les autres ! Il faut penser ainsi, si vous voulez que ça marche !" J’acquiesçais tout en essuyant mes larmes, me replongeant sous ma couverture et dans mon livre jusqu'à ce que la porte sonna, comme à son habitude, Jean s'en alla ouvrir. "Mlle Wood, bienvenue au manoir Williams-Jones, Mlle Jones vous attend dans le salon." Il ferma la porte et l'accompagna, Liza apportait déjà le thé et les petits gâteaux. Je pris la peine de me lever non sans difficultés, être enceinte de 6 mois n'aidait en rien. "Bonjour, je suis Neela... venez installée vous." Je lui serrais la main avec douceur, l'invitant à se mettre dans un des fauteuils prêt de la cheminée afin qu'elle ne se réchauffe. "Je suis contente que vous m'ayez appelé." Je ne connaissais pas vraiment son histoire, je savais qu'elle avait besoin d'aide, et qu'elle avait eu vent de l'association. Donc elle était soit battue, soit enceinte, et peut-être même les deux à la fois... mais vu son air craintif que j'avais trop connu chez Travis, je me doutais du pourquoi de sa venue. Je lui servis un thé chaud, Jean et Liza nous laissèrent seule, j'eus un petit sourire tendre en lui posant sa tasse devant elle. "Je ne suis... absolument pas pressée, je veux que vous vous sentiez à l'aise. On peut se vouvoyer ou se tutoyer, c'est comme vous voulez, et puis, on peut parler de tout ce dont vous voulez, d'accord ? Vous n'avez absolument rien à craindre ici." Je voulais vraiment la mettre à l'aise, je ne savais pas vraiment comment aborder la chose, et à vrai dire, j'estimais que le premier pas devait venir d'elle pour ne pas qu'elle se sente forcée.

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MessageSujet: Re: Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones]   Les mystères de la nuit révélés au grand jour [Neela M. Jones] Icon_minitimeDim 9 Déc - 22:04

"Mlle Wood, bienvenue au manoir Williams-Jones, Mlle Jones vous attend dans le salon."

Cette amabilité et politesse me surpris, instinctivement je m'étais attendue à qu'on me foute dehors. Mais le caractère avenant de l'homme m'aida à me détendre un peu. J'avais du mal à reprendre le dessus sur mes émotions, c'était plus facile habituellement, plus évident, mais je n'étais pas venue ici pour mentir, jouer des apparences, sourire en racontant des banalités, enfouissant au plus profond de moi mes blessures. J'étais venue ici pour dire la vérité, me mettre à nue, chose que je n'avais pas l'habitude de faire, ça m'effrayait, parce que je ne serais plus protégée par ce mur, par mon jolie sourire, et mon beau visage, le tintement de mon rire ne me servirai à rien, parler risquer d'ouvrir des portes que j'avais fermé à clé dans l'idée de ne plus jamais aller regarder à l'intérieur. Mais, voila, elles avaient beau être fermée à clé, chaque nuit les ombres du passé s'écoulaient par le trou de la serrure, se déversant en moi, peu à peu, lentement, comme une douce torture. Parler risquer de fissurer le masque que j'avais fondu sur mon visage. Mais pourtant, j'étais venue, et même là, devant cette homme, je me sentais incapable de faire un pas en avant, mais malgré mon envie furieuse de m'enfuir à toute jambes, je ne bougeais, pas immobile, comme Narcisse au bord de son étang. Dans mon reflet, l'image éloignée de la prostituée, de l'esclave, de l'orpheline, de la femme battue, de la fille triste, qui avait peur, enfermée dans le coffre de la voiture, de mes yeux qui pleurent quand des hommes viennent dans mon corps. Et pourtant, cette image, cette personne, elle était moi, mais je la mettais à distance, pour pas qu'elle me fasse trop de mal, mais c'était refuser une part de ce que j'étais, et qui me dévorait de l'intérieur. Pourquoi j'étais venue ici ? Parce que malgré mon sourire, les choses n'allaient pas toujours si bien. Pourquoi faire confiance à cette femme ? Aucune idée… Et puis j'ai jamais dis que je lui faisais confiance, peut-être n'arriverai-je même pas à lui dire quoique ce soit, mais si j'étais venue jusqu'ici c'était pas pour rien… Je tuerai pour une dose de coke.

Le majordome m'invita à entrer, j'acceptai timidement et de plus en plus anxieuse * Il faut que tu te détendes, que tu te contrôles * me répétai-je en essayant de garder mes mains le long du corps au lieu de jouer avec le bouton de ma veste ou d'agiter la mèche de cheveux qui tombait sur le rebord de mon œil gauche. C'était ça l'embêtant, si je devais dire la vérité, être moi, vraiment moi, et que je ne pouvais pas me reposer sur l'apparence joyeuse que je me donnais la plus part du temps pour me protéger des autres, ça voulait dire que je ne pouvais pas non plus me mentir à moi-même, que mon angoisse latente n'avait plus de barrière qui l'empêchait de se développer et que je n'avais plus aucun mensonge à servir à mes peurs pour les apaiser. Je ne me sentais pas en sécurité, parce qu'à l'intérieur de moi-même je n'étais pas en sécurité, pourtant je savais que je ne craignais aucun mal ici. Et puis les années d'orphelinat suivit de Liverpool et de Londres ne m'avait pas vraiment fait me sentir protégée, je vivais dans un perpétuel sentiment profond d'insécurité, qui s'amplifia de seconde en seconde tandis que je suivais le majordome dans le corridor jusqu'au salon où il me guida.

Je n'avais jamais mis les pieds dans un endroit pareil, sauf quand on me payait pour le faire, ou du moins qu'on payait les patrons du réseau, puisque les prostituées ne touchaient absolument rien de cet argent et étaient plus traitée en esclave qu'autre chose. Nerveuse je posai ma main droite sur mon poignet gauche, comme pour protéger quelque chose. La maison avait l'air vraiment immense, et le salon m'impressionnait déjà beaucoup, il y avait pleins de beaux meubles, des tapis et des canapés et fauteuils qui avaient l'air très confortables, il y avait même une cheminée où un feu superbe se consumait, embaumant la pièce d'une chaleur douce qui tranchait sur la froideur du dehors. C'est qu'il faisait sacrément froid dehors, à cette saison, j'avais l'habitude d'avoir froid, mais d'un coup, j'étais comme déstabilisée par tout ça. J'étais déjà venu dans un endroit comme ça, mes yeux effleurèrent avec un regard de crainte l'un des canapés, semblables à un canapé dans un salon à peu près identique dans un manoir de Liverpool où un homme riche m'avait entrainé une fois. J'avais dans les 16 ans, j'avais déjà été bien conditionnée pendant trois longues années, droguée et battue continuellement pour être bien obéissante, je devais sourire, être belle, dès que le client payait, je lui appartenais, ces gens vendaient mon corps à d'autres qui m'achetaient. Je passais de mains en mains, de canapés en canapés. Je souriais. Je devais faire ce qu'on me disait, si il voulait quelque chose, j'obéissais, quoiqu'il me demandait, je devais le faire. Ca faisait mal, mais je devais sourire, ça faisait mal mais je devais faire semblant de jouir, pour honorer leur désir, leur excitation, leur donner tout le plaisir qu'ils voulaient. On ne réfléchit plus, si on réfléchit, on meurt, on ne peut pas s'en échapper, de toute façon, on est obligée de subir ça, toute les nuits, plusieurs fois par nuit, avec plusieurs hommes différents en quelques heures parfois, ou en même temps.

Mes entrailles se tordirent, une vague de dégout remontant en moi. Je détournai les yeux, fermant les paupières un instant. * Maitrise toi, garde le contrôle, c'était il y a quatre ans, c'est terminé maintenant, pu personne ne peut t'atteindre comme ils l'ont fait… * Sauf… * Derek… * sauf la raison de ma présence ici. Je remerciai poliment le majordome qui m'avait accompagné. La femme assisse dans le fauteuil près de la cheminée se leva pour me saluer, je remarquai son ventre signe d'une grossesse avancée, et regrettai de la déranger et de la fatiguer plus que sa grossesse ne le faisait déjà. La jeune femme blonde me serra la main avec douceur.

"Bonjour, je suis Neela... venez installée vous."

C'était donc la femme que je devais rencontrer, cette femme savait en partie pourquoi j'étais là, la raison de ma venue, elle pouvait voir la vrai Amelia… je lui souris tout de même, peu importe que les masques tombent, si je ne souriais pas c'était la porte ouverte à n'importe quoi, j'étais très intimidée, et ça se voyait.

- Bonjour, je suis vraiment désolée de vous déranger, je vous remercie de m'avoir invité à venir…

Répliquai-je en rougissant, baissant les yeux. Je soupirai et déglutis, essayant de me reprendre, de contrôler mes émotions. La nervosité et la peur était beaucoup trop perceptible dans ma voix, je devais enfouir au plus profond de moi mon angoisse. Elle m'invita à m'asseoir sur un fauteuil près du feu, j'eu une seconde d'hésitation, craignant une sorte de piège. * Détends toi Amy, ça va.. * Pourquoi je n'arrivai pas à me conduire normalement ? J'obéis et m'assis, j'étais tout près du feu, je sentais sa chaleur, je tendis mes doigts gelés vers les flammes pour me réchauffer, je remarquai le tremblement de mes mains * Zut ! *, je les retirai vivement et les posais sur mes genoux, essayant d'opter pour une posture droite et détendue au possible, sans m'agiter dans tout les sens.

"Je suis contente que vous m'ayez appelé."

Elle m'observait, je lui souris, et prenant mon courage à deux mains la regardais moi aussi sans détourner les yeux, honteuse qu'elle puisse savoir. Je remarquai qu'on avait apporté du thé et des gâteaux, je n'y avais pas encore prêtée attention, trop tournée vers mes pensées, que vers le moment présent. Je croisai les jambes, soufflant un peu, les mains bien posées sur mes cuisses, voila, je reprenais le contrôle. Je n'aimais pas me sentir en danger. Elle servit du thé fumant dans une tasse et la posa devant moi sur table basse. Est-ce que c'est pour moi ? Je n'osais pas boire, inquiète de faire une bêtise. Mais je la remerciais poliment encore une fois.

"Je ne suis... absolument pas pressée, je veux que vous vous sentiez à l'aise. On peut se vouvoyer ou se tutoyer, c'est comme vous voulez, et puis, on peut parler de tout ce dont vous voulez, d'accord ? Vous n'avez absolument rien à craindre ici."

Sa gentillesse eut le don de me rassurer un peu et de me détendre, mais le reste de sa phrase, et ce que début de conversation sous-entendait, refit resurgir mon angoisse de là où je l'avais enterrée. Je chassais ces pensées et me concentrais sur elle, j'espérai vraiment que ma venue ne la fatiguait pas trop avec son bébé. Je repensais à ce qu'elle avait dit, il était rare que je tutoies quelqu'un, et le plus souvent on ne me vouvoyait pas. A l'orphelinat nous apprenions des vertus, un peu trop poussées à l'extrême, d'humilité et de respect, et puis mon… statut social, et mon passé, m'avait aussi conditionné à me sentir inférieure aux autres. Je ne me permettais donc pas de tutoyer quelqu'un, je n'oserai jamais, même si elle me le demandait. Il n'y avait encore qu'entre nous qu'on se tutoyait, entre orphelins de Dublin, entre les prostituées de Liverpool, et les filles de Soho. Mais par contre, nous, on ne manquait pas de nous faire sentir qu'on était pas en position d'être respectées, quand tous ces hommes par centaines ont utilisé mon corps, ils ne m'ont jamais vouvoyé, ils m'ont insulté, humiliée, possédée, traitée comme un jouet, et jamais respectée, ils ne m'ont même jamais remercié. Ca me surprenait toujours, quand un homme comme Jack la première fois où nous nous sommes vu au cabaret, se comportait avec moi comme avec une personne normale, sans me traiter avec supériorité, en me vouvoyant, en me parlant avec respect et politesse. Pareillement à l'hôpital où le personnel était toujours d'une gentillesse et d'un respect qui m'était tellement étranger habituellement quand on s'adressait à moi. Je déglutis, cherchant mes mots, quoi dire, c'était difficile…

- Je… je vous remercie. Comme je vous l'ai dit au téléphone, je… C'est l'hôpital qui…

Ok… J'arrêtai de parler une petite seconde, ça n'allait pas, j'avais perdue toute l'assurance dont je faisais preuve d'habitude. Je décroisai mes jambes et les croisai dans l'autre sens, ma main alla repousser ma mèche de cheveux en arrière, la manche glissa légèrement sur mon poignet, le gauche toujours, que je me dépêchai de reposer sur mes genoux, le cachant de ma main droite.

- Excuse moi… euh excusez-moi, je suis un peu…

Nerveuse ? Intimidée ? Terrifiée ? * Allez reprends toi Amy… * Je toussotais, mal à l'aise, ma main se serra autour de mon poignet.

- Je suis désolée…

M'excusai-je avec la désagréable impression de m'enfoncer à chaque mot que je prononçais. C'était quoi cette erreur débile ?

- Je suis venue parce que l'hôpital m'a parlé de vous et qu'il m'ont dit que je devrais venir vous voir…

Voila, c'était un peu mieux, je souris à nouveau, mais mon sourire manqua cruellement de naturel, je détournai les yeux, un peu gênée. Qu'est-ce que j'étais sensé dire ? Est-ce qu'elle savait ? Evidemment… Sinon on m'aurait pas envoyé ici dans ce manoir… Je soupirai. J'étais là pour quoi déjà ? Parler de ce que m'avait fait Derek ? Je ne savais pas si j'en étais capable. Pourtant j'étais une femme forte, non ? Je tenais tête, je m'accrochais… Je sentis mes yeux devenir légèrement humides.

- Excusez-moi, je ne sais pas… je ne sais pas quoi dire… je n'ai pas l'habitude de faire ça…

C'était un peu comme aux drogués anonymes finalement non, je devais parler de moi, du fond de mon cœur, combien de fois avais-je éclaté en larmes là-bas… Pourquoi à l'extérieur de cette salle de réunion blanche avec ses petites gâteaux et ses litres de cafés pour apaiser la quinzaine de personnes souffrant d'une violente addiction, je n'y arrivais plus ? Je sentis les larmes me monter aux yeux et je me dépêchai de reprendre mon calme et de les repousser au fond de moi. J'essuyai mes yeux devenus légèrement rouges du revers de la manche. Je les avais encore, ces marques, ces bleus, il était malin, il frappait là où ça ne se voyait pas, en haut des cuisses, sur la poitrine, un peu le ventre, dans le dos, les reins, les hanches… l'avantage de travailler à moitié nue, il ne lui restait pas beaucoup de place, mais il ne se privait pas pour autant, ce coup-ci il avait même fait un petit extra, et il me restait un bon bleu sur l'épaule droite et une marque d'étranglement dans le cou. Mais bon, au boulot, les autres filles savaient très bien quand il s'était passé quelque chose, rien qu'en me voyant arriver le soir, en voyant mes yeux plus craintifs que d'habitude, mon corps qui avait plus de mal à s'offrir, mon silence, ma gêne, quand nous nous changions dans les loges, et où d'un simple coup d'œil elles pouvaient observer les marques sombres qui tuméfiaient ma peau. Je baissai un peu ma manche sur le poignet, reposant ma main dessus, tic nerveux.

* Putain, je tuerai pour une dose de Coke… * Mes ongles se plantèrent dans mon bras, sans même que j'y prête attention, la tension montait. Je sentis une larme m'échapper avant même que j'ai le temps de la retenir, je détournai vite la tête et essuyai ma joue avec le revers de ma manche qui glissa sur mon avant-bras gauche, dévoilant la marque au fer rouge.

- J'ai beaucoup hésité avant de vous appeler, et de venir… Même tout à l'heure encore j'étais pas sûre de moi… je le suis toujours pas… Je… d'habitude, j'arrive à… à avoir l'air d'aller bien… et à contrôler mes nerfs…

Je passai mes mains sur mon visage, mon expression joyeuse, bien que stressée, avait laissée place à la peur et à la fatigue.
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