Nous sommes tous différents, quoi qu'il arrive, chacun de nous a ce petit quelque chose qui fait que l'on sort du lot, certain le cache et l'oubli, oublie à quel point ils sont uniques alors que d'autres préfèrent le montrer, s'affirmer et montrer jusqu'où ils peuvent aller pour ne pas tomber dans la banalité. La mode, les vêtements, la coiffure, la musique, nos goûts sont différents et se croisent pour donner cet aspect de variété, les différences se voient partout, à chaque instant, dans la rue, dans notre foyer ou à l'autre bout du monde. Un caractère est ce qui nous forge et nous rend plus unique que jamais, la gentillesse, l'amour ou la haine, tout ceci forme une seule et même chose, nous.
Si je devais me définir je n'emploierai pas les mots méchant ou peste, malsaine ou meurtri, je dirai simplement que je suis ainsi, peut-être sournoise, peut-être gentille, chacun de vous peut me voir différemment. Certains diront que je suis une jolie jeune fille pleine d'ambition qui arrivera à ses fins par n'importe quel moyen, n'hésitant pas à user de nombreuses fourberies pour toucher son but ultime. Une vipère dont la confiance n'est pas son maître mot, qui ne dit rien se contentant de sourire et qui finit par vous trahir lorsqu'elle se lasse de son petit jouet. D'autres diront que je ne suis qu'une combattante, une rebelle qui cherche une place dans cette vie, une vie sans merci, un bateau perdu en mer essayant de trouver en vain la terre ferme. Car avouons-le nous nevivons plus, nous survivons dans ce monde qui tombe en morceaux, s'écroule un peu plus chaque jour et nous observons, nous voyons notre perte, notre règne toucher à sa fin et malgré tout, nous continuons de fermer les yeux sur ce qui nous entoure et ainsi nous nous laissons emporter, enfermé dans cette bulle qu'est le triste quotidien. Les rumeurs, les messes basses et ce que pensent les autres ne sont rien, ces phrases lancées à tout va ne signifient rien pour moi. Car je vais vous dire qui je suis, je suis Louve Mackenzie Harroche, une jeune fille ambitieuse au passé douloureux, un électron libre qui passe au-dessus de règles et des interdictions, une boule de nerfs qui ne cesse de bouger de droite à gauche. Je suis une vipère oui, j'aime arriver à mes fins quelle que soit la façon ou la manière que j'emploie, je n'hésite pas à descendre mes ennemis lorsque l'occasion se présente et je mords quand l'on me contrarie. Mais tout ceci je ne le fais pas pour mon propre plaisir, je le fais pour vivre et tenir bon. Si j'étais un objet je serais une corde, la corde, ce petit bout de ficelle si utile, cette chose à laquelle on s'accroche pour vivre, pour ne pas tomber, la dernière chose qui nous sépare du vide, la corde pour mourir, mourir avec lenteur et violence à la fois comme je fais souffrir ceux que je déteste, ceux qui me font du mal et me marchent dessus. Je suis cruelle et douce à la fois, ceux qui me connaissent vraiment vous diront à quel point ils peuvent compter sur moi. Mon visage d'ange accentue cette sensation de confiance qui s'installe entre mon interlocuteur et moi, je suis d'une bonté incroyable mais je n'aime pas, non, je déteste le montrer car comme on dit, trop bonne trop conne non ? Gentille et attachante certes mais je ne le suis qu'avec ceux que j'apprécie, autant dire qu'il faut se retrouver du bon côté de la ligne pour pouvoir m'apprécier car ceux qui ne m'aiment pas vous diront que je suis une chipie, une garce, quelqu'un qui aime se montrer au-dessus des autres, qui monte sur ses grands chevaux pour s'affirmer. Une fille qui ne parle pas et continue de sourire écoutant les petits potins qui trainent dans les couloirs pour aller les répandre un peu partout et ruiner votre vie, je vous dirai que oui, oui je suis ainsi car l'on me définit comme on me voit, puis-je lutter contre l'avis des autres ? Il est vrai que les nouvelles croustillantes m'intéressent et que je m'empresse d'aller les balancer aux autres lorsqu'elles concernent ceux que j'apprécie le moins mais est-ce un crime de vouloir animer un lieu où la mort et la maladie sont omniprésentes ? Est-ce cruel de vouloir s'amuser un petit peu ? Je ne crois pas. J'aime me montrer, me montrer comme je suis, forte et impénétrable, enfermé dans cette coquille que personne ne peut briser. Sensible et forte à la fois, méchante et douce en même temps, je suis ce que vous voyez et non ce que vous entendez.

« Paris, mon beau Paris, ma ville, mon cœur, si tu n’étais pas là, si je n’étais pas née ici, née dans tes bras, que serais-je devenue ? Une paysanne labourant ses champs sous un soleil de plomb ? Ou une bimbo se pavanant en talon aiguille dans une de ces villes à la mode ? Au diable les robes et les sacs hors de prix, qu’importent l’argent et la popularité si je t’ai toi ? Car au fond, tu es tout ce qui me reste. » J’étais assise au bord de la Seine observant les vaguelettes venant s’écraser sur les murs de pierre dans un paisible claquement. Le ciel, cette immensité que l’on rêve de toucher depuis la nuit des temps était vêtu de son voile noir sur lequel s’accrochaient de petites étoiles qui scintillaient et pétillaient donnant vie à cette infinité. Chaque nuit je m’allongeais aux côtés de la Seine et profitais de ce moment d’intimité pour gribouiller dans un journal auquel je tenais tant. Paris ma muse, ma mère, mon foyer. Je ne voyais pas cette ville comme ses habitants, elle était pour moi, un refuge, une source d’inspiration dans laquelle je puisais lorsque la mélancolie faisait surface, la tristesse m’envahissant. Chaque soir je lançais des mots au hasard comme pour me vider de ces sentiments qui inondaient mes yeux de larmes, de quoi pouvais-je me souvenir ? De rien et de tout à la fois. D’une seule phrase en particulier, ces mots que ma mère avait prononcé peu de temps avant que la mort ne vienne la faucher. « Je ne crains plus l’orage, je chante la vie et ses bonheurs jusqu’à ma dernière heure » Elle prit ma petite main glacée entre les siennes s’endormit sans jamais rouvrir les yeux. J’étais seule, éternellement seule et le temps s’en fichait, il continuait sa route alors que la mienne s’était achevé au chevet de ce lit où cette femme étrangère et familière à la fois était passé de l’autre côté, me laissant à mon triste sort. Devais-je lui en vouloir ? La pleurer ou la haïr ? Je n’étais ni sa chair, ni son sang et pourtant, les larmes perlaient et glissaient sur mon visage rougi par la colère et le désespoir. Je devais avoir dix ans, dix petites années lorsque la nouvelle tomba, au fond je le savais, je le sentais, elle n’était pas blonde et mon paternel non plus, pourtant une lueur d’espoir vacillait dans mon cœur mais cette petite flamme disparut en un claquement de doigt, en une fraction de seconde lorsque les mots furent prononcés. Je n’étais qu’une bâtarde, une enfant adoptée par pitié. Les années passèrent et les saisons se succédaient sans que ma colère ne baisse. J’étais suédoise, née d’une simple aventure qui avait tourné en un déni de grossesse, neuf mois dans le ventre d’une inconnue avant de voir le jour dans cette ville qui m’avait adopté et que j’avais pris pour foyer. La richesse et la popularité, j’avais grandi dans un univers que je ne considérais pas comme le miens, j’étais un électron libre peu friand des bonnes manières, une rebelle qui ne supportait pas l’univers des strass et paillettes. Je ne visais pas de grandes études, avocate, chirurgienne ou encore physicienne, rien de tout ça ne m’intéressait, je me voyais traverser les pays et les mers, voguant sur les Océans, volant au-dessus des nuages, voyager, voilà mon métier, la seule chose qui m’intéressait. Depuis l’annonce de mon adoption et de cette maladie qui avait touché ma mère, je ne rentrais plus chez moi. Pourquoi ? Pourquoi avais-je tout abandonné pour me réfugier dans les rues de Panam ? Moi-même je me le demande. Fuir la réalité, triste et dure réalité cette vie qui s’achevait minute après minute et que je n’osais pas regarder en face. Je haïssais ma mère biologique et ses enfants qu’importe si elle en avait ou non. Elle m’avait laissé mourir à feu doux et je ne pouvais lui pardonner. Contrairement à beaucoup d’autres, je ne cherchais pas à la retrouver, à entrer en contact avec elle, que pouvais-je lui dire si ce n’est tout ce que mon cœur gardait ? Je lui aurais probablement craché des insultes à travers le téléphone maudissant sa douce progéniture qu’elle avait décidé de garder. Elle m’avait jeté, jeté comme un vulgaire chien dans la rue alors que je n’étais qu’une chose sans défense, incapable d’appeler sa maman au secours, j’étais une petite fille destinée à mourir, mais au fond, ne sommes-nous pas tous condamnés ?


« La pluie s'abat sur la ville alors que mon coeur ne bat plus. L'émerveillement, la joie et la magie dont je me nourrissais pour survivre n'est plus, je meurs à petit feu alors que le temps s'en fiche royalement continuant sa course folle. La pluie douce mélancolie qui berce Paris nous plongeant dans une petite bulle que personne ne peut percer, un cocon où l'on se sent seul et vide, vide de tout sentiment. Qu'il pleuve, qu'il neige, qu'il vente ou que le soleil soit à son zénith, je suis plongé en permanence dans ce nid, enchaîné à cette vie qui n'était plus mienne, je suis étrangère dans ma propre ville. Partir recommencer et continuer de haïr. Paris la garce que je suis devenue te quitte. »
L'avion décolla en douceur alors que je refermais les pages de mon journal dans un long soupire, le coeur au bord des lèvres. Londres, l'inconnu, un saut dans le vide. Réussir ou tomber plus bas que terre ? Le destin allait me guider alors que j'avançais aveuglément vers lui. Je pouvais sauter du monstre de fer pour ne pas avoir à affronter la réalité, mais la chute libre n'était pas mon fort. Pourtant, j'adorais le vide, me sentir transporter sans toucher le sol, voler, voler de mes propres ailes me sentir libre, libre de tout et de rien à la fois, c'est surement pour cette raison que j'avais choisis l'avion plutôt que le train surement moins couteux, je voulais percer les nuages, être coupée du monde avant de reprendre le dur quotidien, m'évader durant quelques heures et profiter de ce bercement. Je fixais le hublot alors que je me plongeais doucement dans la musique que j'écoutais. Il faisait noir, je ne voyais rien, seulement le reflet de ma petite personne et je me regardais, la petite fille joyeuse laissa place à une adolescente de dix-huit ans prenant son avenir en main, travailler, étudier, galérer, voilà ce qui m'attendait et je le savais, mais à quoi bon se morfondre sur son sort alors que votre vie, vos sentiments, votre compassion sont enterrés six pieds sous terre laissant place au vide total de votre esprit ? À quoi bon essayer de lutter alors que le combat est perdu d'avance ? Je me le demandais. Les minutes s'écoulaient doucement alors que j'observais le soleil pointer le bout de son nez, le ciel était gris, les nuages formaient un triste océan qui semblait interminable. Le silence régnait dans le grand avion alors que seul les moteurs rugissaient à l'extérieur et j'étais là, à attendre. Le nez de l'appareil plongea dans les nuages et ce fut la chute libre au sens figuré du terme, mon esprit se retrouva plongé dans l'inconnu alors que le monstre de fer descendait doucement. Les visages des passagers semblaient serein, j'étais une tâche au milieu de cet océan de bonheur comme un monstre dans le monde des bisounours, un peu d'humour n'allait pas me faire du mal. Il pleuvait et la ville s'éveillait petit à petit. La pluie, la seule chose qui m'était familière dans un monde qui n'était pas le miens, mais avais-je vraiment le choix ? Pouvais-je me permettre de jouer la difficile alors que la vie m'offrait un nouveau départ ? Je me contentais de ce que j'avais.

Un, deux, trois, quatre, les pieds foulant à peine le sol, se jeter sur le parquet froid et crasseux, remonter à la force de ses bras, transpirer mais se sentir libre et sans loi pendant à peine quelques heures, être heureuse et reprendre le quotidien. Mes poumons brûlaient, mon sang s'était transformé en acide et me faisait souffrir, mes membres étaient rouges mais je continuais car je me sentais bien, laissant couler la rage qui me tordait les tripes, faisant des mouvements parfaitement calculés, ni trop fort, ni trop mou, bouger son corps comme si les os n'existaient plus, se tortiller au rythme d'une musique puissante. J'aimais la danse comme l'on aime une personne, se défouler sans aucune limite, s'évader et se surpasser. J'étais devenue une battante parce qu'il le fallait, se retrouver dans l'inconnu et se battre malgré toute. Marcher dans la rue d'un pas décidé, un sourire narquois aux lèvres et parler, de tout et de rien, débiter des conneries à la seconde en se fichant de l'avenir et du reste, tout envoyer en l'air mais garder la tête sur les épaules. Rester sur terre et voler en même temps. Infirmière, une vocation que jamais je n'aurais envisagé à Paris mais pourtant, j'étais dans une grande école dont la réputation ouvrait à coups sur les portes des meilleurs hôpitaux de la région. Battre de cils, les yeux pétillants et du désespoir dans ma petite voix d'enfant innocente, ma technique avait marché à la perfection, le pauvre homme avait succombé à ma détresse, me proposant un appartement d'étudiant à un prix cassé. J'étais une garce, je me jouais de tout le monde usant de mon charme et de mon innocence pour faire céder les coeurs les plus froids, obtenir ce que je voulais sans le moindre effort.
Haïr encore et encore, s'approcher, se frôler mais détourner le regard lorsque celui qui vous hante se retourne et vous souris, savoir tout de lui alors que votre nom n'est rien pour cet homme. Le quotidien, courir partout, soigner, côtoyer la mort, travailler avec elle dans les pattes et puis finalement se battre pour la vaincre, l'éloigner quelques minutes et la voir revenir, s'énerver et s'émerveiller, craquer, pleurer et reprendre de plus belle.
Assise sur un petit banc, chocolat chaud en main, mon regard se perdait parmi la foule alors que de petits flocons glacés venaient se déposer délicatement sur ma chevelure dorée. Mon coeur tanguait entre mon passé et le présent, je regrettais le temps où j'étais qu'une petite fille ignorante gambadant dans Paris dans une petite robe à fleurs surement hors de prix, rire aux éclats et sentir la brise me caresser le visage. Infirmière au Saint-James Hospital, une petite jeune parmi de nombreux mordus de chirurgie et autres charcutage. Au fond, était-ce vraiment pour soigner des personnes ayant déjà un pied dans la tombe que j'ai choisi cette vocation ? Ou seulement par vengeance, je ne sais plus trop. James, voilà la raison qui m'a attiré dans cet hôpital, un homme, mon demi-frère qui ne se doutait pas une seule seconde de qui lui tournait autour. Je l'avais en face de moi chaque jour, respirant son parfum, écoutant sa voix, je le trouvais détestable et pourtant, mon coeur tanguait.